Mesdames, mettez votre charge mentale sur la table

Mesdames, mettez votre charge mentale sur la table
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La répartition des tâches ménagères continue de faire parler d’elle, mais les couples ont toujours du mal à en parler. Comment faire changer cela ?
  Cette année aura été celle de la découverte par le grand public de la notion de « charge mentale », intégrée dans la pensée féministe depuis les années 80, et devenue très à la mode depuis que l’humoriste Emma en a fait le sujet d’une bande dessinée Fallait demander, partagée plus de 200 000 fois en une semaine, et qui n’a pas fini de faire parler d’elle.  

La charge mentale, qu’est-ce que c’est ?

Si vous étiez en vacances en Papouasie lorsque cette BD a été relayée par la moitié de vos contacts féminins sur Facebook, on vous fait un rapide topo. La charge mentale représente la part invisible des tâches ménagères, autrement dit la planification et l’anticipation de ces dernières pour assurer les besoins du foyer : savoir ce qu’il faut faire, décider quand il faut le faire… Les femmes en sont les principales dépositaires, étant considérées par leurs conjoints comme une sorte de super-chef de projet du quotidien qui leur donne des ordres, que certains exécutent volontiers en ayant l’impression de contribuer grandement à la bonne marche du foyer. Ce qui représente, comme le souligne Emma et plusieurs sociologues, une charge importante puisque la femme ne se contente pas d’assurer 71% des tâches ménagères1, elle les emmène en pensée partout avec elle, au bureau, en vacances, au spa, etc…  

Une prise de conscience des femmes épuisées

Cette irruption de la charge mentale dans les discussions de couple a provoqué une déflagration plus ou moins retentissante dans de nombreux foyers de France et de Navarre, les femmes ayant enfin un mot à poser sur leur épuisement permanent et leur sentiment de devoir se démultiplier pour venir à bout de toutes leurs missions. Nombreuses sont celles qui ont choisi de mettre le sujet sur la table en demandant à Monsieur s’il comptait continuer à se laisser porter par les événements, avec plus ou moins de diplomatie. Lesdits Messieurs, pour beaucoup, n’ont pas bien compris ce qui leur arrivait, même si certains ont eu l’élégance de reconnaître qu’ils se retrouvaient dans les situations dépeintes par Emma lorsque leurs femmes leur ont fait lire la BD, et qu’effectivement, lorsqu’ils proposaient de préparer le dîner, ils n’avaient pas la moindre idée de ce qu’ils trouveraient dans le frigo familial ni de ce qu’il fallait acheter pour compléter le menu.  

Responsabiliser sans culpabiliser

La question des tâches ménagères, et maintenant de leur planification, reste l’un des sujets les plus explosifs de la vie de couple. Le principal écueil pour les femmes qui souhaitent faire entendre leur voix et reconnaître à leur conjoint la charge mentale qui pèse sur elle, c’est la tentation de la culpabilisation. Si un « Comment ça, tu ne sais pas lancer le cycle laine ? » soulage sur le moment, son effet à long terme est nul, voire contre-productif, le mâle humilié n’étant nullement stimulé par les réflexions acides. Pour en parler sereinement, mieux vaut considérer l’autre comme un stagiaire débutant en gestion de foyer, que vous avez pour mission de former pour qu’il devienne peu à peu autonome. Nettement plus constructif comme schéma !  

Apprendre à déléguer

C’est là que les femmes se heurtent à une difficulté commune à tous les managers : la difficulté à déléguer. Parce qu’elles connaissent par cœur le mode d’emploi de la machine à laver, la marque de céréales préférée de chaque enfant, l’horaire des cours de tennis et de piscine, etc… la tentation est grande de se dire qu’on gagne en temps et en efficacité en organisant et en faisant tout soi-même, même si fatigue et lassitude se font sentir. Mesdames, il va falloir lâcher du lest si vous voulez que les choses changent ! Et pour cela, cesser de dire « Je m’en occupe » avant même que Monsieur ait eu le temps de dire ouf. Et tant pis s’il y a quelques ratés au début, il ne faut pas perdre de vue l’objectif final : une meilleure répartition entre vous.  

Vers une répartition plus harmonieuse des tâches ménagères

S’il n’est pas souhaitable que le couple se lance dans des comptes d’apothicaire avec tableau excel et planning hebdomadaire de kifékoi, il est bénéfique de se poser ensemble – autour d’un bon dîner de préférence – afin de rendre ce moment convivial, et de lister toutes les tâches ménagères effectuées par l’un ou l’autre. Une fois cet état des lieux réalisé, il sera plus facile d’argumenter dans le calme sur le temps et l’organisation que représentent ces différentes missions, et de les attribuer à l’un ou l’autre selon ses compétences, son temps disponible, sa sensibilité, ses talents, etc… chacun étant ensuite responsable de A à Z non seulement de leur exécution, mais aussi de leur planification. Travailler en équipe, chacun ayant son autonomie, sans courir après l’illusion d’un partage absolu qui ne pourrait qu’être décevante. Alors, qui descend les poubelles ce soir ?   1 – Etude INSEE 2010 – Le temps domestique et parental des hommes et des femmes