Maladies du foie : mieux vaut prévenir !

Maladies du foie : mieux vaut prévenir !
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Les hépatites, la Nash, l’hémochromatose et, bien sûr, la consommation excessive d’alcool endommagent le foie. Peu à peu, sans crier gare. Réagissez avant le stade des complications graves.
  De forme triangulaire et de couleur rouge-brun, le foie est l’organe le plus volumineux du corps humain (1,5 kg chez l’adulte auquel s’ajoutent environ 800 grammes de sang circulant). Pourtant, nous savons à peine où le situer – sur le côté droit de l’abdomen, juste sous le diaphragme – et nous le sous-estimons. Or c’est un organe vital, une vraie station d’épuration.

À savoir

Normalement, la concentration de gamma GT (enzymes fabriquées par les cellules hépatiques) est comprise entre 4 et 18 unités internationales par litre de sang (UI/l) chez la femme et entre 6 et 28 UI/l chez l’homme. D’un dosage à l’autre, il y a des variations mais quand le foie fonctionne bien, le taux de gamma GT est inférieur à 35 UI/l chez la femme et à 45 UI/l chez l’homme.

Pour les transaminases, si le foie est en bonne santé, les ALAT sont compris entre 6 et 25 UI/l chez la femme et entre 8 et 35 UI/l chez l’homme et les ASAT entre 6 et 25 UI/l chez la femme et entre 8 et 30 UI/l chez l’homme.
 

Une usine de nettoyage

Les fonctions du foie sont multiples (plus de 300) et les chercheurs ne cessent d’en découvrir de nouvelles. Son rôle principal est cependant de filtrer. Il reçoit, via la veine porte, le sang chargé de nutriments issus des aliments, le nettoie et le purifie des substances qui pourraient être nuisibles pour l’organisme : alcool, pesticides, conservateurs, colorants… mais aussi composants chimiques des produits d’entretien et des cosmétiques qui pénètrent par la peau. Il envoie les substances non toxiques vers la bile d’où elles sont ensuite acheminées dans le corps puis reversées dans le sang et éliminées par les reins, les poumons, la peau ou bien évacuées par les selles. C’est d’ailleurs le foie qui secrète la bile – un suc gastrique qui facilite la digestion et l’absorption des aliments, notamment les graisses – et la stocke dans la vésicule biliaire. Il est par conséquent important d’en prendre soin.   Cet organe étonnant a la particularité de pouvoir s’auto-régénérer mais jusqu’à un certain point seulement. Si, pour une quelconque raison, une partie du foie est malade ou si l’on en enlève un morceau, les cellules mortes ou disparues sont remplacées par des nouvelles, de telle sorte qu’il retrouve sa taille d’origine et un bon fonctionnement. À condition toutefois de prendre à temps les bonnes mesures pour faciliter son retour à la normale. Or, il n’est pas toujours facile de savoir si son foie est en mauvaise santé ou engorgé car les affections dont il peut être atteint évoluent souvent en catimini pendant des années. Elles sont donc souvent diagnostiquées tardivement, ce qui complique leur prise en charge.
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Fibrose et cirrhose

En France, la principale cause de maladie hépatique est l’alcool, responsable de 70 à 80 % des cirrhoses. Une consommation excessive et régulière de boissons alcoolisées entraîne tout d’abord une inflammation chronique qui conduit à la formation de tissus fibreux. On parle alors de fibrose hépatique. Les cellules du foie sont peu à peu détruites, ce qui se traduit par une augmentation du taux sanguin des enzymes transaminases synthétisées dans cet organe. Sans sevrage, il ne peut plus fonctionner normalement, c’est le stade de la cirrhose. Une fois installée, celle-ci ne peut pas régresser mais l’arrêt de l’alcool peut la stopper. Sinon gare aux complications, potentiellement mortelles : hypertension portale, ascite (accumulation d’eau dans l’abdomen), hémorragie digestive par rupture de varices œsophagiennes, cancer du foie. Les hépatites virales aiguës et chroniques, B et C surtout, peuvent être également lourdes de conséquences : fibrose, insuffisance hépatique, cirrhose, cancer du foie. La transmission du virus de l’hépatite B (VHB) – 100 fois plus contagieux que le VIH – se fait essentiellement au cours des rapports sexuels non protégés ou par voie sanguine : partage de drogues par injection intraveineuse, de matériels tels que brosse à dents ou rasoirs, mais aussi au cours d’actes de tatouage et de piercing ne respectant pas les normes de stérilisation. Toutes les hépatites B ne nécessitent pas un traitement à vie, tout dépend de leur gravité, mais une surveillance régulière s’impose. Bon à savoir : le vaccin contre le VHB, désormais obligatoire en France chez les enfants, protège efficacement à l’âge adulte. Quant à l’hépatite C, transmise essentiellement par voie sanguine, elle se traite aujourd’hui très bien (pendant 8 à 12 semaines), ce qui permet d’abaisser le risque de cirrhose et de complications et de guérir plus de 95 % des patients. Mais il ne faut pas tarder.

Conseils de pharmacien

Pris en excès ou en continu, certains médicaments – antidépresseurs, antifongiques, anti-inflammatoires, antibiotiques, neuroleptiques et antidouleur – peuvent détériorer le foie. Surtout si cet organe est en mauvaise santé et en cas d’alcoolisme chronique. Cela dit, n’arrêtez pas ou ne diminuez pas votre traitement sans l’avis du médecin qui, au besoin, le modifiera. Prudence en automédication. Par exemple, ne dépassez pas 4 g par jour de paracétamol (Doliprane®, Dafalgan®, Efferalgan®) et si vous prenez d’autres médicaments en même temps, vérifiez qu’ils n’en contiennent pas aussi.
 

La Nash en augmentation

Alors que les hépatites commencent à diminuer, la Nash (acronyme anglais pour « stéatose hépatique non alcoolique »), autrement dit la forme la plus sévère de la maladie dite « du foie gras », est en nette augmentation. La faute à la malbouffe (trop calorique, trop riche en graisses et en sucres) et à la sédentarité, responsables d’obésité, de diabète et de syndrome métabolique, défini par au moins trois de ces cinq critères : obésité abdominale, triglycérides élevés, cholestérol HDL (le « bon ») bas, glycémie élevée, hypertension artérielle. Dans l’Hexagone, la situation est moins catastrophique qu’aux États-Unis où elle sera bientôt la première cause de transplantation hépatique. On estime néanmoins qu’1,5 million de Français sont atteints d’une Nash avec une fibrose grave. La maladie évolue aussi silencieusement en cirrhose…
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L’hémochromatose

Pour cette maladie génétique touchant trois fois plus les hommes que les femmes, le mécanisme est très différent. Elle provoque une hyperabsorption intestinale de fer entraînant des dépôts de ce fer dans les organes : foie et pancréas en premier mais aussi cœur, muscles, os, peau. Seule solution pour réduire le taux de fer dans le sang et ainsi éviter cirrhose, diabète, insuffisance cardiaque ou rénale : des saignées régulières.

Idées reçues

1- Les maladies du foie ne concernent que les alcooliques
Faux. Elles sont certes liées à 80 % à une consommation excessive d’alcool mais les autres sont dues à une surcharge du foie en graisse (Nash), une hépatite, un diabète, une hémochromatose.

2- Les maladies du foie entraînent toujours la jaunisse
Faux. La grande majorité d’entre elles ne provoquent aucun symptôme durant des années. Les hépatites, l’obstruction du canal biliaire par un calcul, une tumeur ou une intoxication médicamenteuse peuvent cependant donner le teint jaune.
 

Moins d’alcool !

Comme toutes ces maladies restent longtemps silencieuses et que les signes d’alerte sont tardifs et peu spécifiques (fatigue, sensation de pesanteur dans le ventre, sang dans les selles, démangeaisons cutanées), mieux vaut agir à temps ! En arrêtant ou en diminuant sa consommation d’alcool ; en rééquilibrant son alimentation – moins de graisses animales et de sucres (viandes rouges, plats industriels, viennoiseries, sodas, friandises) qui surchargent le foie – au profit des fruits, légumes et poissons ; en pratiquant un sport ou une activité physique régulière ; et en faisant de temps en temps des dosages sanguins.

Info +

Un livre : Il était une foi(e) les transaminases & Gamma GT de Lucile Gélébart-Caitucoli (Alpen, 2021).

Une association : Fédération SOS Hépatites (hépatites et maladies du foie). Numéro vert 0800 004 372 (gratuit depuis un poste fixe ou un portable) et soshepatites.org.