Gros corps malade

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Un chien en surpoids ou obèse est davantage exposé aux maladies chroniques et, donc, à une diminution de son espérance de vie si rien n’est fait pour remédier à la situation.

En médecine vétérinaire, un chien est considéré comme obèse dès lors qu’il présente un excès de poids d’au moins 30 % par rapport au poids idéal. Cette surcharge est liée à l’accumulation de tissu adipeux. De récentes recherches ont montré que ce surplus de graisse n’a pas que des conséquences mécaniques, par exemple en pesant sur les articulations, mais qu’il perturbe également le fonction­nement de nombreux organes.

Le tissu adipeux, un véritable organe

Le tissu adipeux n’est pas inerte : il est constitué de plusieurs types de cellules et sécrète de nombreux médiateurs, les adipokines. Un excès de tissu adipeux s’accompagne d’une sécrétion anormale de ces adipokines et d’autres molécules qui stimulent l’inflammation.

À terme, l’obésité peut donc provoquer un état inflammatoire chronique dans l’orga­nisme, à l’origine de dérèglements des systèmes endocrinien, hépatique, cardiovasculaire, respiratoire, urogénital, etc.

Des analogies avec l’homme

Le syndrome métabolique est bien connu chez l’homme : il apparaît en présence de plusieurs facteurs comme un excès de graisse au niveau de l’abdomen, une hypertension, une résistance à l’insuline (hormone qui permet aux cellules d’utiliser le glucose), entre autres. Ce syndrome prédispose notamment au diabète ainsi qu’aux maladies cardiovasculaires.

Chez le chien obèse, si des anomalies similaires sont observées (insulinorésistance, hyperglycémie chroni­que, hypercholestérolémie), les conséquences sont mal connues à ce jour. Contrairement à l’homme, le diabète est rare chez le chien, toutefois, d’autres affections sont favo­risées par la surcharge pondérale : hyper­tension, affections rénales, dérèglement des glandes surrénales.

L’athérosclérose est aussi peu fréquente chez le chien car à l’inverse de l’homme, il a plus de « bon » cholestérol (HDL) que de « mauvais » (LDL). Il n’en demeure pas moins que l’obésité canine peut entraîner un excès de cholestérol (au sens large), et que son accumulation dans le foie peut avoir des effets délétères et être à l’origine d’une insuffisance hépatique.

Maladies endocriniennes

Le tissu adipeux sécrète plusieurs hor­mo­nes majeures, dont la leptine. Celle-ci informe le système nerveux central sur l’état d’embonpoint et favorise la satiété. Chez un animal trop gros, une résistance à la leptine est observée et les signaux envoyés – censés « couper la faim » –, ne sont plus efficaces, même si la production de leptine augmente. Le degré de résistance pourrait être un facteur pronostique important dans l’évolution de l’obésité.

L’hypothyroïdie peut autant être une cause d’obésité qu’une conséquence. Le contexte inflammatoire, associé à la surcharge pondérale, inhibe le fonction­nement normal de la glande thyroïde. Une grande proportion de chiens obèses présente ainsi des taux d’hormones thyroïdiennes anormaux, qui peuvent être normalisés avec une perte de poids.

La surproduction d’une autre hormone, la prolactine, est également décrite chez cer­tains chiens en surpoids. Ce dérèglement hormonal pourrait favoriser le dévelop­pement de tumeurs mammaires chez les chiennes.

Un bilan annuel du chien adulte permettra au vétérinaire d’évaluer les pertur­ba­tions hormonales en lien avec l’obésité. Des analyses de sang et d’urine rensei­gneront sur d’éventuels phénomènes pathologiques en cours d’évolution.

Mieux vaut prévenir…

L’obésité canine est une maladie inflammatoire et métabolique dont la gravité ne doit pas être sous-estimée. La plupart des complications en lien sont réversibles avec une perte de poids, mais plus le traitement tarde à être mis en place, plus il est difficile de revenir en arrière. Le mieux est bien sûr d’anticiper l’installation d’un surpoids en surveillant l’évolution du poids et de la silhouette du chien dès son plus jeune âge, et surtout s’il est stérilisé.

Modifications cardiorespiratoires

Les chiens en excès de poids supportent très mal la chaleur et deviennent progres­sivement incapables de pratiquer une activité physique intense. Ces intolérances résul­tent en grande partie de modifi­cations cardiorespiratoires.

Chez certains individus, une altération de la structure du cœur accompagne le surpoids : le muscle cardiaque (myocarde) est hypertrophié et les contractions ne sont alors plus aussi efficaces.

L’obésité peut en outre favoriser une obstruction des voies aériennes supérieures, comme la paralysie du larynx et l’affaissement de la trachée, particulièrement fréquente chez les chiens à face courte, dits « brachycéphales ».

Des risques particuliers

Pour le vétérinaire, il est plus difficile de prendre en charge un chien obèse : les ponctions veineuses et les palpations sont compliquées, le risque anesthésique est plus élevé et les interventions chirurgicales plus délicates.